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Président du Réseau Français sur le Processus de Production du Handicap (RFPPH) Formateur accrédité sur le modèle de développement humain-processus de production du handicap (MDH-PPH), et dans les domaine des droits et des politiques inclusives / administrateur organismes de formation et secteur médico-social / ancien cadre dans le secteur médico-social et formateur

jeudi 6 octobre 2016

Les séparer, pour leur bien

Les séparer, pour leur bien.

De nombreux professionnels de l’éducation et de l’enseignement, ordinaire ou spécialisée, trouvent naturelles et bénéfiques l’orientation et l’affectation d’« élèves handicapés » dans des classes spéciales, dans des instituts spécialisés, qui leur sont dédiés. Par conséquent est considérée comme naturelle et bénéfique l’idée que ces élèves sont « par destination » hors des classes et des établissements destinés à tous les autres élèves. Et bien sûr, cette ségrégation est pensée, légitimée, justifiée, « pour leur bien ». Dans la classe ordinaire, ce ne serait pas pour leur bien, car il est convenu d’avance qu’ils seraient en écart de niveau, qu’ils pourraient ressentir négativement le regard des autres, qu’ils pourraient même être en situation de souffrance, qu’ils apprennent mieux quand ils sont entre eux, en petit nombre, qu’on leur propose des choses adaptées, voire avec des méthodes qui seraient mieux adaptées spécifiquement à ce type de public.



Cette idée de dispositifs spéciaux s’appuie donc sur une hypothèse, sur un sentiment ou une conviction de leur efficacité, et de l’inefficacité en miroir des dispositifs ordinaires pour ces populations. Mais qu’est-ce qui atteste que, aujourd’hui, cette modalité de scolarisation séparée est plus efficace ? Y a-t-il des évaluations qui mettent en avant que cette modalité de scolarisation est plus efficiente ?

A défaut de statistiques, on peut procéder par comparaison pour tenter d’y voir plus clair. Et s’inspirer des nombreuses études qui ont été réalisées dans le champ des sciences humaines, par de nombreux chercheurs et avec des perspectives pluridisciplinaires, sur les difficultés et l’échec scolaires. On peut essayer de voir, par comparaison, ce qui se passe avec des élèves qui ne sont pas en situation de handicap, mais qui rencontrent des difficultés, parfois importantes.

Marie Duru-Bellat, une des meilleures spécialistes de l’école en France, écrit à propos de cette question (in Sciences Humaines, n° 285, octobre 2016) : « La ségrégation affecte l’efficacité pédagogique elle-même. En effet, regrouper les élèves les plus faibles – «  pour leur bien », dit-on parfois, mais aussi par le jeu des options ou tout simplement du quartier – fabrique des classes où les chances d’apprendre sont systématiquement plus faibles : les enseignants y adaptent leurs ambitions et leurs méthodes au niveau de leurs élèves, et les élèves eux-mêmes développent –ils savent bien qu’ils sont faibles – des attitudes et des comportements peu favorables au travail. ».

Si on entre dans cette logique, toute plaiderait en faveur d’une inclusion (avec beaucoup de tolérance, de bienveillance, de précautions…) des élèves en situation de handicap dans les classes ordinaires, y compris en termes d’efficacité pédagogique et d’efficience d’apprentissage. La ségrégation affecterait de la même manière l’efficacité pédagogique. Cela éviterait aussi les auto-assignations à l’incapacité qu’on observe avec ces jeunes. (lire un article de ce blog)


Elle poursuit : « Les élèves de milieu défavorisé font preuve, quand ils sont mêlés à des camarades plus favorisés, de visées scolaires plus ambitieuses. » Dans la même logique, ces élèves en situation de handicap, dans les mêmes conditions, pourraient peut-être avoir des ambitions scolaires plus élevées. Ne serait-ce pas un pari à prendre ?


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